Plankton Planet Project Pilot

Lors des 2 expéditions circum-globales Tara Oceans (2009-2013), les scientifiques à bord de la goélette Tara ont pu prélever plus de 40 000 échantillons couvrant la totalité du plancton sur 220 sites et trois profondeurs. L’analyse morphologique et génomique de ces échantillons a permis de générer le dictionnaire le plus complet jamais réalisé sur la biodiversité d’un écosystème planétaire.
Ces résultats ont fait l’objet d’un numéro spécial de la revue Science.
Mais pour réaliser une couverture globale de la composition du plancton à l’échelle planétaire, il fallait lancer une initiative citoyenne et solliciter les milliers de voiliers, bateaux militaires, pêcheurs, cargos qui sillonnent toutes les mers du globe à longueur d’année.
Le projet Plankton Planet a donc été lancé et une phase pilote initiée en janvier 2015 grâce à une bourse exploratoire de la prestigieuse Richard Lounsberry Foundation (Washington DC, USA), Plankton Planet (P2) est le premier programme d’océanographie biologique citoyenne basé sur le séquençage massif de code-barres ADN (metabarcoding) des extraits de communautés de plancton. L’écologie par l’ADN représente aujourd’hui une véritable révolution qui permet de détecter et de quantifier l’ensemble des organismes d’un écosystème (des virus aux animaux) dont on a extrait l’ADN total. L’approche est miniaturisée, peu coûteuse, rapide, robuste, et permet de s’affranchir d’années de travail d’experts en taxonomie jusque-là nécessaires pour l’analyse d’un grand nombre d’échantillons planctoniques. Les protocoles développés et mis en oeuvre par nos soins lors des expéditions Tara-Oceans1, ont été simplifiés et adaptés pour un usage citoyen n’exigeant aucune expertise particulière, avec un mode de prélèvement du plancton, de filtration, et de stockage par dessiccation sans électricité ni produit chimique, permettant in fine des analyses génomiques.
Au cours de l’année pilote 2015, 184 prélèvements de plancton réalisés par une quinzaine de bateaux sur divers trajets pendant un an ont été analysés.
L’ADN du plancton collecté a été extrait et le séquençage d’une petite région du génome des espèces présentes dans l’échantillon a été réalisé, suivant la méthode du « metabar coding ». De façon intéressante, environ 96 % des codes obtenus ont déjà été vus dans les échantillons de TARA, et 82 % des codes identifiés par TARA ont été retrouvés dans les échantillons de P2. De plus, environ un millier de codes est unique à chaque bateau et représente une signature du trajet du voilier.
Aucune contamination par des champignons, bactéries ni ADN humain n’a été trouvée. Les « planktonauts » ont bien travaillé et la méthode est robuste ! Cette analyse valide complètement le principe du recueil de plancton en conditions réelles à partir de voiliers de plaisance.
Merci à tous les « planktonauts » !

Ces travaux de science citoyenne ont été publiés dans Frontiers in Marine Science (17 august 2022), dans un article intitulé « Plankton Planet : a frugal, cooperative measure of aquatic life at the planetary scale ».