Le grand défi de Plankton Planet en 2020 : la planktoscopie pour tous

Vous le savez sûrement, Plankton Planet est une initiative internationale à but non lucratif, réunissant des partenaires académiques (CNRS, MIT, Stanford University, University of Maine, University of Auckland) et citoyens (Fondation Tara Océan, France-USA ; Association loi 1901 Plankton Planet, France), avec des moyens encore modestes. Pour autant, le projet que ses membres actifs ont imaginé (et commencent à concrétiser !) reste ambitieux. Constituer une flotte de marins volontaires et inventer de toute pièce une boîte à outils pour les équiper et pour réaliser avec eux un travail scientifique de qualité demande une somme de travail et une organisation de haute voltige. Pourquoi ? Et bien tout simplement parce que cela revient à transformer n’importe quel voilier en un petit frère de Tara capable d’observer et mesurer la vie dans l’océan. Dans cette époque où science et société doivent se retrouver au plus prêt pour le bien de tous, à cœurs vaillants, rien d’impossible !

Au centre de cet engagement mis en route dès 2015 et validé dans la foulée par la première vague de planktonautes, un enjeu majeur consiste à créer des outils basés sur le concept de la science frugale, c’est-à-dire à petit prix, commode d’utilisation et robuste, pour qu’ils soient accessible au plus grand nombre, et avant tout scientifiques et standardisés. Aujourd’hui, il n’est pas nécessaire d’être un bureau d’étude d’une grosse entreprise technologique ou bien un laboratoire d’excellence en ingénierie pour concevoir ces outils, d’autant plus que leur coût et la marge commerciale qui accompagne la vente de produits à finalité frugale n’intéressent pas les financeurs traditionnels de l’industrie. On est dans la logique des makers, ces nouveaux artisans capables dans leurs ateliers de réaliser des prouesses avec tout les composants et matériaux dont ils peuvent disposer.

Alors qu’une grande partie des organismes composant le plancton sont minuscules et bien souvent invisibles à l’œil nu, il est nécessaire de pouvoir  les rendre visibles et ainsi de les observer après les avoir récoltés dans un filet bien adapté. Dans la boîte à outils que nous concevons et appelons Planktokit, l’outil essentiel à préparer maintenant est le microscope. Ça fait déjà un petit bout de temps que ceux qui suivent Tara et Plankton Planet ont entendu parler ou ont même vu un des tous premiers prototypes du Planktoscope, visible ici aussi.

Alyse vous présente l'élégant Planktoscope à section triangulaire, pour l’instant mis de côté
Alyse vous présente l'élégant Planktoscope à section triangulaire, pour l’instant mis de côté.

Une chose est d’avoir un prototype qui fonctionne dans les mains de son concepteur, une autre est qu’il devienne utilisable par tous dans tout type de circonstances. C’est là où aujourd’hui Thibaut Pollina, envoyé par Colomban de Vargas dans le laboratoire de Manu PrakashMister Frugal Science ») à Stanford depuis un an, concentre tous ses efforts, accompagnés pour ça par ses compère makers bretons Noan Le Bescot, David Le Guen et Jeremy Guyard, par l’expert roscovite en planktoscopie, Sebastien Colin, et par le planktoécologiste villefranchois Fabien Lombard. Il s’est avéré à l’usage que le premier prototype, à section triangulaire est très délicat à mettre au point, même s’il présente un grand intérêt fonctionnel. Thibaut a donc choisi de suivre une nouvelle stratégie vers un prototype plus pratique à concevoir.

Quatre gros enjeux dictent ses choix avec maintenant la robustesse comme premier guide : 1) un appareil robuste, portable et performant, 2) un prix de vente très loin des dizaines de milliers d’euros d’un microscope classique et plus encombrant, mais à peine plus performant, 3) un principe ouvert et modulaire permettant aux utilisateurs éclairés de l’adapter et de le modifier, 4) une capacité à capturer et à exporter des images numériques par milliers et dans l’immédiat vers des stations d’analyses d’images. A partir de là, les planktonautes en action pourront dans la foulée identifier et quantifier les bébêtes ayant atteint la cellule de capture d’image. Nous croisons les doigts pour qu’une version opérationnelle de cet outil sortent avant la fin de l’année. Vient à point à qui sait attendre !

En attendant, nous avons le plaisir de vous présenter en toute exclusivité les acquisitions en mode “flux automatique” de notre dernier prototype. L’image ci-dessous, sur laquelle plusieurs organismes planctoniques collectés à Villefranche-sur-Mer ont été rassemblés à partir de clichés séparés. La résolution de l’image (la taille du pixel) est de 3 micromètre, ce qui vous dit que ce que vous voyez est beaucoup plus petit que le millimètre (1000 micromètres) !

Quelques exemples de la diversité du plancton de Villefranche-sur-Mer obtenue dans quelques gouttes d’eau: copépodes adultes et juvéniles, ainsi que de nombreux protozoaires (diatomées, acanthaires et dinoflagellés)
Quelques exemples de la diversité du plancton de Villefranche-sur-Mer obtenue dans quelques gouttes d’eau: copépodes adultes et juvéniles, ainsi que de nombreux protozoaires (diatomées, acanthaires et dinoflagellés)

Très joli, n’est-ce pas? Il s’agit maintenant de les identifier, et nous pouvons vous dire que sur ce terrain, ça chauffe en ce moment entre Thibaut et Fabien pour permettre un traitement d’image aux petits oignons et faire de la vraie science avec un appareil bien moins cher que ses pairs utilisés en laboratoire. Vous en saurez plus en suivant les aventures de Plankton Planet dans les mois qui viennent, avec aussi la présentation d’une version plus simple prête à jaillir des tuyaux !